On trouve la notion de Samtosha dans les textes anciens des Yoga Sutras de Patanjali. Classé dans les Niyamas, les actions pour vivre bien avec soi-même, Patanjali explique que c’est “par la pratique du Samtosha, que l’on connaît le plus haut degré de bonheur”. Il précise que c'est un état de contentement qui oriente les pensées et les actes. Ce Niyama permet de voir le verre d’eau à moitié plein plutôt qu’à moitié vide. En orientant nos pensées vers le positif de notre vie on cultive un état d’esprit plus ouvert et cela permet d’être plus sensible à voir et à ressentir le beau dans notre quotidien. Aujourd'hui, les neurosciences ont largement démontré la plasticité cérébrale qui permet, à force de répétition, d’activer de nouveaux circuits neuronaux, nous donnant ainsi la preuve que l’on peut tout à fait changer notre mode d’intégration et d'interaction avec le monde.
Les sociologues définissent le bonheur comme “le degré selon lequel une personne évalue positivement la qualité de sa vie dans son ensemble”. Samtosha, qui comprend aussi l’appréciation des sensations agréables comme boire un délicieux smoothie ou encore admirer la lumière d’un coucher de soleil, est une étape pour accéder au bonheur, qui est, lui, encore plus grand. Toutefois, l’erreur consisterait à confondre plaisir et bonheur : le plaisir est l’ombre du bonheur. Sa nature est instable et souvent le plaisir s’épuise à mesure qu’on en profite; comme le plaisir de manger un gâteau au chocolat qui, consommé en excès, finirait par nous écoeurer, voire nous rendre malade. Barbey d’Aurevilly dit d’ailleurs que “Le plaisir est le bonheur des fous, le bonheur est le plaisir des sages”.
En pratique:
Afin de développer votre capacité à voir le positif, vous pouvez noter dans un carnet, chaque soir, 5 choses positives qui se sont passées lors de votre journée; cela peut être la beauté d’un paysage, une satisfaction au travail, la réussite d’une recette de cuisine, une belle rencontre…
Si vous avez vécu une situation difficile à gérer émotionnellement, notez-la précisément ainsi que votre réaction à cette situation avec les émotions et pensées associées. Puis essayer de trouver des pensées alternatives à celles automatiques que vous avez eu dans le feu de l’action. Enfin chercher une ou plusieurs manières différentes de réagir qui entraîneraient moins de souffrances et que vous pourriez essayer la prochaine fois que la situation stressante se produit.
Vous pouvez également utiliser un mudra, le yoga des doigts, lorsque vous vous rendez compte que vous êtes en train de ruminer des pensées négatives. Kali Mudra permet de transformer les habitudes et les émotions négatives en amour et en joie.
Vous pouvez également utiliser avec le mudra ou en méditation le mantra de Kali “Jai mata Mali, Jai mata Durge” qui permet de transcender la colère et la frustration pour retrouver un mental calme et joyeux.
Patanjali écrit également que Samtosha, “c’est vivre au présent dans un état de paix intérieure dans lequel il n’y a plus ni manque, ni désir d’obtenir.” Le sage nous invite ici à éprouver de la gratitude pour ce que l’on a. Il s’agit de ne plus s’inquiéter de l’accessoire pour trouver l’essentiel. Il précise aussi qu’il est important d’être reconnaissant pour ce que nous avons tout en travaillant pour ce que l’on veut afin, justement, de prendre en compte notre responsabilité dans nos actions.
Les bouddhistes précisent que le non-attachement aux choses et aux évènements n’est en rien de l’indifférence car il y a dans le non-attachement une connotation de joie, de liberté qui nous permet de rester ouverts aux autres. Cultiver le non-attachement nous désengage du cercle vicieux de l’insatisfaction chronique pour se diriger vers un profond sentiment de contentement sur lequel les fantaisies de l’ego n’ont pas de prise.
En pratique:
Kapithaka Mudra peut être pratiqué avec les coudes proches du corps, bras pliés et en ouvrant la poitrine. Ce mudra est très efficace pour retrouver l'enthousiasme et l'harmonie tout en développant un sentiment de gratitude.
Vous pouvez également choisir de faire “un nettoyage de printemps”, non pas pour re-remplir ensuite, mais pour apprendre à vous détacher du matériel tout en développant votre altruisme en donnant à ceux qui en ont besoin.
On comprend donc que le bonheur est un état de réalisation intérieur et non l’exaucement de plaisirs et de désirs illimités tournés vers l‘extérieur. Les bouddhistes définissent Soukha comme un état de plénitude durable qui se manifeste quand on est libéré de l’aveuglement du mental et des émotions conflictuelles. Matthieu Ricard précise que “Soukha est la sagesse qui permet de voir le monde tel qu’il est, sans voiles ni déformations”. Jonathan Lehmann pense d’ailleurs qu’il existe deux “moi” : le “moi histoire” et le “moi présent”. Le “moi histoire” est celui qui ne peut s'empêcher de produire des pensées, de ruminer le passé, de stresser pour le futur. Ce “moi histoire” nous place au centre du monde, favorisant notre vision de la Vie comme étant la vérité. C’est lui qui peut nous aveugler, nous entraîner dans plus de souffrances. Le “moi présent” ne connaît, lui, que l’instant présent, ce moment précieux et insaisissable où tout se passe. On ne peut atteindre le bonheur qu’en étant connecté au “moi présent”. C’est lui qui nous permet de cheminer vers la liberté intérieure, vers Samtosha, vers Soukha.
En pratique:
Pour habiter le “moi présent”, le yoga et la méditation sont des alliés de taille. Cette courte méditation sur l’instant présent youtu.be/LPta_w9VrFw est un début pour en prendre conscience.
Vous l’aurez compris, le contentement et le bonheur ne sont pas seulement liés à l’action, ce sont surtout des états d’être faisant naître un profond équilibre émotionnel issu d’une compréhension subtile du fonctionnement de l’esprit.
Alors à vos tapis les yogis, direction la voie du Bonheur !