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Philosophie du Yoga, les 8 piliers fondateurs


Les yoga sutras de Patanjali pour atteindre l'état de yoga

Il y a plus de 2000 ans, Patanjali eut la brillante idée de mettre par écrit les 8 grandes étapes pour atteindre l’état de Yoga, cet état unifié et serein recherché par de nombreux yogis. Ces savoirs ancestraux sont regroupés sous forme de phrases courtes dans les “Yoga-Sutras”, l’un des textes fondateurs du Raja yoga dont le Hatha yoga, l'Ashtanga et le Vinyasa font partie.Les sutras expliquent comment pacifier le mental qui est habituellement à l'œuvre pour nous entraîner via nos pensées automatiques, nos émotions ruminées, nos préjugés et nos passions dans un abysse de confusions et de souffrances. Patanjali nous donne un chemin concret et merveilleusement efficace pour devenir plus conscient, plus apte à vivre chaque instant dans sa plénitude.


1. Yamas


Patanjali nous dévoile le début de l’aventure pour se libérer de nos souffrances : les Yamas. Ce sont des principes universels de comportements éthiques afin de bien vivre ensemble. En Inde, il existe 25 yamas. Patanjali en définit 5 principaux :

  • Ahimsa est la non violence. Cela englobe à la fois le respect de l’autre dans sa différence mais aussi le respect pour toutes vies sur Terre y compris la sienne. Qu'elle soit physique ou psychologique, la violence entraîne des souffrances pour celui qui l’a reçoit mais aussi pour celui qui en fait usage. Patanjali précise que quand quelqu’un est installé dans la non-violence, l’hostilité autour de lui disparaît.

  • Satya est la vérité. Elle consiste à être authentique, honnête et sincère afin de guider des actes plus justes qui produiront alors les fruits appropriés. La communication non violente (CNV pour les intimes) créée par Marshall Rosenberg est un bel outil permettant d’être au plus proche de Satya et d’Ahimsa dans le respect de l’autre.

  • Asteya est le fait de ne pas voler à d’autres, tant les objets, que le temps, les données ou encore les idées. Ne plus avoir besoin de prendre, c’est aussi accepter la vie dans ce qu’elle est.

  • Brahmacharya est la modération des désirs et des plaisirs. Ce sont les extrêmes, les excès qui provoquent les déséquilibres et consomment notre énergie. Cela correspond aussi au respect de l’autre dans la relation intime.

  • Aparigraha est tout autant l’absence de convoitise que le refus des possessions inutiles qui nous encombrent plus qu’elles ne nous servent. Ce Yama contraste avec nos sociétés modernes qui nous incitent à accumuler des possessions matérielles. Pourtant il est vain de s’attacher à l’impermanent en espérant le voir durer ; tout change ; la vie est mouvement. Aparigraha c’est aussi ne pas s’accrocher à ses certitudes, à ses souvenirs et à ses pensées.

2. Niyamas


Patanjali poursuit son cheminement en nous expliquant les Niyamas qui sont des habitudes, des actions que chacun peut mettre en place pour mieux vivre avec soi-même. Il en énumère également 5 :

  • Saucha correspond à la pureté du corps et de l’esprit. Cela comprend, entre autres, un régime alimentaire sain, un nettoyage quotidien du corps, un espace de vie propre, un entraînement de l’esprit pour rendre les pensées bienveillantes... Ce Niyama nous rappelle de vivre une vie saine et de garder le corps et l'esprit purs.

  • Samtosha est le contentement. Ce Niyama nous permet de voir le verre d’eau à moitié plein. Orienter nos pensées vers le positif de notre vie nous permet de cultiver un état d’esprit ouvert et de nous rendre plus sensible à voir et à ressentir le beau dans notre quotidien. Il nous invite à éprouver de la gratitude pour ce que l’on a; c’est une joyeuse résilience à ce qui est. Patanjali précise que Samtosha c’est “vivre au présent dans un état de paix intérieure dans lequel il n’y a plus ni manques ni désirs d’obtenir”. Il est important d’être reconnaissant pour ce que nous avons et aussi de travailler pour ce que l’on veut afin, justement, de prendre en compte notre responsabilité dans nos actions pour réussir à atteindre cet état de contentement.

  • Tapas signifie discipline. Tapas nous invite à diriger notre énergie vers nos objectifs avec régularité et persévérance. Il comprend également la réduction des mauvaises habitudes qui nous éloignent de nos objectifs. C’est également grâce à une pratique intense et soutenue que l’on améliore le fonctionnement du corps et des sens.

  • Svadhyaya est la connaissance de soi et l’étude des textes. Se poser régulièrement la question “qui suis-je?" permet ce moment d’intériorité, d’écoute intime qui permet d’appréhender le subtil et d’être au plus proche du soi, détaché des étiquettes sociétales.

  • Ishvara-pranidhanaI est la connexion de soi au symbole du divin. Ce n’est pas forcément lors d’une croyance religieuse que l’on s’abandonne au sacré. Le divin peut être la Nature, Dieu, Bouddha, la Terre, l’interdépendance, la Vie, l’Amour universel (...), finalement c’est ce qui est plus grand que soi. Chanter le OM à la fin d’un cours de yoga est une pratique d’Ishvara-pranidhana.

Yama et Niyama sont l’accordage nécessaire pour l’individu afin d’arriver dans un premier stade d’équilibre.


3. Asana


Asana signifie un état, physique et psychique, immobile, heureux et confortable. Il s’agit d’habiter son corps ici et maintenant, de manière stable. L’équilibre corporel se situe entre l’effort et la détente, le faire et le lâcher prise. Dans cet état d’équilibre, les opposés coexistent.Dans les textes anciens, très peu de postures étaient décrites. Les postures assises dominaient dans le but de préparer le corps à rester de longues heures sans bouger pour la méditation. Le Hatha yoga a progressivement ajouté des postures dites “debout, allongée, d’équilibre, de torsion, de flexion, d’inversion” afin de purifier le corps et de faire disparaître les maladies qui sont l’un des obstacles à l’état de Yoga. Les asanas rééquilibrent le corps, créent de l’espace dans celui-ci en libérant les muscles, les os, les ligaments et les viscères de toutes tensions. Dans Asana, la notion d’immobilité implique de tenir la posture comme dans le Hatha traditionnel ou encore dans le Yin yoga. Le Vinyasa, lui, est basé sur les asanas mais le mouvement continu (flow) et la tenue d’une posture sur 5 respirations seulement ne permettent pas de répondre à cette définition d’immobilité. Pourtant, ce style de yoga, quoique plus dynamique, permet aussi un équilibre de l'Être en mettant au centre du mouvement la respiration.


4. Pranayama


Le Pranayama est le contrôle du souffle afin que la respiration devienne fluide, ininterrompue et de qualité. Il est déjà important d’avoir conscience de sa respiration avec ses différents mouvements : inspiration, expiration et suspension. Lorsque le souffle est agité, l’esprit l’est tout autant (l’inverse est vrai aussi) et le corps peut alors manquer d’oxygène nécessaire pour le métabolisme cellulaire. Le Pranayama cultive l’énergie vitale, appelée prana. L’un des but du yoga est d’intensifier le métabolisme énergétique pour réguler et décupler les énergies physiques, mentales et psychiques. Les yogis ont également fait l’expérience que le prana obéit à la pensée; la concentration durant les exercices de respiration est donc indispensable. Une pratique régulière du Pranayama de 5-10 minutes chaque jour vous permettra de retrouver la sérénité et de dissiper certaines tensions corporelles.En Vinyasa flow, c’est le souffle qui permet de faire le lien entre les différentes postures, il est primordial pour l’effet équilibrant de cette pratique dynamique. Avoir conscience de sa respiration permet de rester attentif, de dissiper les pensées parasites et donc de revenir en soi.


5. Pratyahara


Pratyahara est l’étape où l’on est capable de retirer les sens de leurs objets. C’est une manière de calmer nos 5 sens qui, dans la vie courante, sont happés vers l’extérieur par tout ce qui les sollicite. Si le mental cesse de s’identifier à cette vie extériorisée, on est alors libre de retrouver la dimension d’intériorité. Lorsqu’on pratique Pratyahara, l’esprit reste en éveil, attentif à toutes les perceptions intérieures, agréables ou désagréables, tout en restant à la place de témoin qui ressent, sans aucun jugement ou commentaire. On peut s’exercer à Pratyahara en restant notamment attentif aux sensations internes lors des asanas ou encore en pratiquant l’exercice du scan corporel en savasana.


6. Dharana


Dharana est un état de concentration où l’on porte son attention de manière soutenue vers un objet déterminé. C’est une action volontaire qui demande un peu d’entrainement. On peut se concentrer sur sa respiration en sentant l’air entrer et sortir des narines. On peut également utiliser un mantra afin de focaliser notre attention. Les mantras peuvent être récités en sanskrit comme OM Shanti, symbole de paix, ou alors dans la langue de votre choix en valorisant par exemple une qualité que vous souhaitez cultiver dans votre vie comme la confiance, l’amour ou encore la sérénité.A ce stade, le mental continue de produire des pensées. Lorsqu'une pensée survient, Dharana nous invite à ne pas la suivre, ni l’analyser, ni la juger. Il s’agit plutôt de revenir inlassablement au point d’attention choisi en début d’exercice. Dharana est l’action de rassembler, de se connecter à ce qui est, bien ancré dans le présent. Le Hatha yoga nous invite ainsi à développer une attitude d’attention sans tensions, dans un effort équilibré impliquant volonté et lâcher prise.Dharana est l’étape indispensable d'entraînement de l’esprit avant la méditation.


7. Dhyana


Une fois Dharana maîtrisé, on peut atteindre Dhyana, la conscience profonde. Dhyana est l’étape de la méditation. Le calme intérieur survient. Le yogi se libère des bruits extérieurs et intérieurs, plus aucune pensée ne vient perturber le mental. La respiration, le rythme cardiaque et le métabolisme s'harmonisent. L’agitation du mental s’arrête, permettant à l’esprit d’être plus clair, plus aiguisé.Quand on ne cherche plus rien, quand on n’est plus ni dans l’action, ni dans la réflexion, quand on est juste là, dans cette qualité de présence à soi et à la Vie alors, la conscience se libère du temps, de l’espace et de la causalité.Dhyana implique notre Être tout entier, c’est un point de bascule vers un autre état qui dépasse notre compréhension intellectuelle et sensible du monde occidental. Chercher à l’expliquer en détails est vain puisque c’est un état de conscience à expérimenter.


8. Samadhi


Le Samadhi est dans la continuité de Dhyana. C’est l’étape ultime du yogi accompli, un état de contemplation, de plénitude, de lucidité extrême et de joie profonde. Samadhi est la pure conscience unifiée où notre part d’universel se réunit avec l’Univers. Samadhi est au delà de notre dualité. C’est la libération de la conscience, l’abandon de l’ego. On existe alors comme faisant partie d’un Tout infiniment plus grand.



Dès le premier chapitre des Yoga-Sutras, Patanjali définit le Yoga comme l’arrêt de l’activité automatique du mental. Atteindre cet état d’union et de plénitude demande du temps, de la persévérance et de la régularité.Yamas, Niyamas, Asana et Pranayama sont les moyens pratiques du cheminement vers l’état de Samadhi, cherché par le yogi. Ils constituent la voie externe dans laquelle l’attention volontaire est encore fréquente. On aborde avec Pratyahara, Dharana et Dhyana la voie interne où l’effort d’attention cède la place à l’état d’attention.Il est important de connaître le cheminement des yogis vers l’état de Yoga, il est encore plus important de l’expérimenter, de le vivre. Le yoga se pratique bien sûr sur le tapis mais également au quotidien. C’est une science ancestrale intégrée qui nécessite un engagement de tout notre Être, afin de tendre vers la liberté intérieure, la sérénité profonde.

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